Plus longue est l'attente, plus belles sont les retrouvailles [pv Ed <3333333]

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ane n'aurait pas reproché à Edward de ne pas lui répondre ou de détourner le sujet s'il avait choisi de le faire, après tout, elle l'aurait bien mérité. Mais elle l'aimait qu'il lui réponde aussi honnêtement. Il n'y avait pas à dire, c'était le bon moment. Ils avaient décidé d'être sincères, et c'était ce qu'ils faisaient. Bien sûr, ça ne les empêchait pas le moins du monde de se chambrer gentiment malgré tout, mais au moment de se parler avec le coeur, ils le pouvaient vraiment, ils en étaient capables, et puisqu'ils le pouvaient, ils le faisaient. Et autant dire que Jane savourait le moindre mot qu'Edward prononçait à son adresse. Parce qu'ils étaient tendres, criants de sincérité, parce qu'elle avait le sentiment d'exister plus que jamais dans le regard qu'il posait sur elle, et parce que ce qu'il voyait d'elle, c'était ce qu'elle était bien souvent incapable de percevoir de son côté, en dépit de tous les efforts qu'elle faisait pourtant pour le déceler.

Elle aimait savoir qu'elle le troublait comme personne. Et elle espérait surtout que personne n'arriverait jamais à le troubler comme elle le faisait, parce qu'elle adorait vraiment ça, à un point inimaginable, et que c'était réciproque. Et ça la touchait que de l'entendre louer sa force de caractère, alors qu'elle avait par moments le sentiment d'en manquer. Ce n'était pas faute de vouloir être forte, pourtant, mais ça ne suffisait pas toujours malgré tout. Mais c'était vrai, elle ne parvenait pas à se résoudre à baisser les bras. Certains qualifieraient peut-être ce comportement de pure et simple sottise, mais pour elle, il n'en était rien. Elle allait jusqu'au bout de ce qu'elle pensait et de ce qu'elle désirait, voilà ce qu'elle faisait vraiment. Son insistance pouvait passer pour désespérer, elle appréciait qu'il y voit autre chose, qu'il comprenne autre chose. Elle aimait qu'il constate les efforts qu'elle faisait, qu'il les apprécie à sa juste valeur. Elle l'aimait, somme toute, sans rien avoir à ajouter.

-Alors tu es tranquille, répondit-elle dans un sourire. J'arrêterai jamais de faire ma Jane. Rien qu'avec toi et rien que pour toi.

Ce n'est pas comme si elle pourrait faire autrement, en même temps. Parce que ce qu'il décrivait, c'était ce qu'Edward lui inspirait naturellement, instinctivement. Une chose plus forte qu'elle, contre laquelle il lui était bien impossible de lutter. Si faire sa Jane, c'était tout ce qu'il décrivait, alors elle resterait sa Jane quoi qu'il advienne et ne changerait jamais, car ça faisait partie intégrante de qui elle était et ne cesserait jamais d'être, peu importe les circonstances, du moins avec lui. Faire sa Jane, c'était juste être amoureuse de lui, tout compte fait.

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ane ne saurait dire si Edward était un privilégié ou non, du moins quand il était question d'elle. Car, certes, elle l'aimait plus que tout au monde, et il était la personne la plus importante au monde à ses yeux. Mais il était, par la même occasion, la personne qu'elle avait le moins ménagée, clairement, dans son entourage. Elle n'y était pas allée de main morte, avec lui, elle n'avait pas manqué d'occasions de le faire souffrir. Certes, c'était tout le point de leur conversation : ça ne se reproduirait plus, point final. Mais ça ne changeait pas grand-chose au fait que ça s'était produit par le passé, et qu'à ce moment-là déjà, pourtant, il avait été un privilégié.

Il ne fallait pas se leurrer, en effet. Accepter qu'elle fasse sa Jane, c'était aussi accepter certaines choses qu'il ne supporterait chez personne d'autre. Mais tant mieux, s'il aimait ces privilèges, car dans tous les cas, la jeune femme ne pourrait rien y changer, même si elle devait le décider. C'était lui et personne d'autre. Il n'y avait qu'avec lui qu'elle voulait faire tant d'efforts, il n'y avait qu'à ses côtés qu'elle se sentait forte, qu'elle se sentait libre, il n'y avait qu'avec lui qu'elle voulait être tout ce que son âme soeur lui avait dit qu'elle était.

Avant de répondre quoi que ce soit, Jane déposa longuement ses lèvres sur celles du jeune homme, avec tendresse. Elle aimait qu'ils en soient arrivés là. Les combats qu'ils avaient menés, le mal qu'ils s'étaient faits, avaient consolidé une relation forte et belle. Bien sûr, il y avait des centaines de choses qu'elle ferait différent, des milliers de choses dont elle n'était pas franchement fière. Mais l'un dans l'autre, elle se sentait bien, elle se sentait heureuse, et elle se sentait plus proche du jeune homme qu'elle ne l'avait jamais été.

-Ce ne sont pas des privilèges, répondit-elle quand même doucement une fois que leurs lèvres furent séparées. C'est juste... que je ne peux pas être complètement moi sans toi.

Ce qui était complètement vrai, et ce qui était parfaitement logique. Evidemment, qu'elle ne pouvait être qu'une pâle version d'elle-même quand Edward Baker n'était pas à ses côtés. Ils existaient dépendamment l'un de l'autre. C'était ainsi, c'était un fait. Eux-mêmes, individuellement, avaient à peine de raisons d'être. C'était difficile à admettre, surtout pour deux personnalités fières, personne n'avait envie de renoncer à son individualité. Mais leur individualité, c'était eux, ensemble. Parce que, ensemble, ils formaient un tout. Unique et soudé. C'était un fait, c'était une certitude... et ça faisait du bien de l'accepter pour de bon, sans rechercher à tout prix à changer les choses... Elles ne cesseraient pas d'être ce qu'elles étaient par pure convenance, après tout.

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ane et Edward ne pouvaient pas se leurrer à ce sujet, ne devaient surtout pas se leurrer à ce sujet. Ensemble, ils ne faisaient plus qu'un, l'un sans l'autre, ils n'étaient jamais que la moitié d'un tout, et ce n'était pas un sentiment agréable, bien au contraire. Ils devaient certes se ressentir l'un sans l'autre pour se rappeler combien ils étaient indispensables l'un à l'autre. Mais pas trop souvent quand même. Jane ne pouvait que constater à quel point cette pause leuravait fait du bien, mais elle ne voulait surtout pas que cela se reproduise. Certes, la jeune femme n'avait pas l'intention de réemménager tout de suite chez eux, mais ça n'ôtait rien au fait qu'elle se sentait plus proche de lui que jamais, et comptait bien rester proche de lui quoi qu'il puisse advenir, quelles que puissent être les circonstances. Ils étaient indispensables l'un à l'autre, et admettre que ce n'était non plus un problème mais bien au contraire une bénédiction, c'était une chance, un constat, quelque chose qu'ils ne devaient surtout jamais mettre de côté, peu importe les circonstances et quoi qu'il puisse bien advenir.

Jane était heureuse d'entendre Edward lui assurer qu'elle avait fait de lui l'homme qu'il était. Elle aimait cela, vraiment, parce qu'elle aimait terriblement l'homme qu'il était aujourd'hui. Elle pouvait l'admettre aujourd'hui, elle avait tout autant aimé l'homme qu'il était avant, mais aujourd'hui, il était juste... parfait. Elle aimait avoir contribué à cela. Et elle pouvait lui rendre la pareille à tout moment. Personne ne serait de cet avis peut-être, mais elle considérait que si elle avait gagné en maturité, si elle était capable de poser sur le monde ce regard critique qui jusqu'alors lui avait échappé, c'est parce qu'il faisait partie de sa vie. Peut-être qu'ils n'étaient pas faits pour être aimés de qui que ce soit, mais tant qu'ils s'aimaient l'un l'autre, alors ils s'aimaient aussi à titre individuels. A eux deux, ils formaient le changement qu'ils avaient toujours voulu incarner... Tout ce que Jane avait voulu devenir, elle le devait à son âme soeur.

-Moi aussi, répondit-elle, je te dois tout.

Elle pouvait le lui avouer. Elle lui devait son bonheur, ses malheurs, mais elle lui devait clairement, en tout cas. Elle était ce qu'elle était parce qu'elle était avec lui. Et elle adorait ça. Elle se sentait plus épanouie que jamais, et c'était grâce à lui. Les mots lui manquaient pour exprimer la gratitude qu'elle éprouvait à son égard au vu des circonstances.

-Et j'aime l'homme que tu es aujourd'hui.

Bien sûr, elle aimait l'homme qu'il était avant aussi, mais elle adorait profondément celui qui était son âme soeur maintenant.

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ane savait maintenant, ou en tout cas était capable de l'admettre, qu'elle avait toujours aimé Edward, même dans les moments où il lui en avait fait voir de toutes les couleurs, même dans les moments où il l'avait fait souffrir. C'était bien là la grande difficulté dans le rapport qu'elle avait longtemps entretenu avec lui : une insupportable dualité qui avait révélé en elle une fragilité qu'elle n'avait surtout pas voulu manifester, mourtant. Elle aurait voulu se montrer forte, et l'être bel et bien, en toutes circostances, mais dans les faits, ce n'était pas le cas, dans les faits, elle était souvent fragile, vulnérable. Mais Edward avait aussi réussi à la rendre plus forte, en grande partie d'ailleurs parce qu'il l'avait tant éprouvée, en fin de compte.

Ils devaient se rendre à l'évidence : ils avaient été trop jeunes quand tout ceci avait commencé pour eux, et encore maintenant, ils étaient trop jeunes... et pour couronner le tout, ils n'avaient jamais été franchement matures, aussi bien l'un que l'autre. Ils avaient dû apprendre à grandir, à évoluer ensemble, et ça n'avait pas toujours été une mince affaire. Par moments, Jane avait eu l'envie de renoncer, par moments, elle avait cru que ce serait mieux, mais la vérité, c'est qu'ils ne faisaient qu'un, accepter d'évoluer, c'était une chose qu'ils devaient faire de concert. Et quand bien même ils n'avaient pas atteint la perfection pour l'heure, loin de là (même s'ils s'amusaient quelques fois à prétendre le contraire), ils apprenaient doucement à s'en approcher. Et même s'ils n'étaient peut-être pas encore la forme la plus accomplie de ce qu'ils pouvaient être, ils s'en approchaient, et c'était ce qui comptait.

-Et la femme que je suis aujourd'hui, tu en penses quoi ? l'interrogea-t-elle, évidemment mutine, non sans avoir au préalable déposé une nouvelle fois ses lèvres sur les siennes.

Le goût de leurs baisers était une des choses les plus savoureuses et satisfaisantes au monde, et si elle se contraignait parfois à s'en passer, ce qui était entièrement certain, c'est qu'elle ne serait jamais capable de s'en lasser, par contre. Jane se sentait, à l'heure actuelle, apaisée, rassurée, aimée... c'était des sentiments qui avaient eu trop souvent l'habitude de la déserter, surtout quand elle perdait de cette confiance en elle qui n'était pas toujous aussi appuyée qu'on pourrait le croire, qui ne l'était jamais quand il était question d'Edward. Enfin... jusqu'ici. Car là, elle ne ressentait aucun doute, elle ne se sentait pas inquiète ou dévalorisée. Elle avait le sentiment d'être importante, précieuse, adorée, et elle ne connaissait rien qui sache à ce point égaler ce qu'était son ressenti en cet instant précis.

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Incroyable, voilà un adjectif qui plaisait bien à Jane. N’importe quel adjectif flatteur ne pouvait évidemment que lui convenir, certes, mais elle sentait, dans le ton qu’Edward employait, dans la manière qu’il avait de la regarder, à quel point il était sincère en cet instant. Il pesait ses mots, il les prononçait parce qu’il les pensait, tout simplement, et aux yeux de Jane, ça faisait une différence inestimable. Ça faisait toute la différence, en fait. Incroyable, tout comme lui l’était… et pour cause, quand on y réfléchissait, c’est vrai qu’on avait peine à y croire, à leur histoire, à leur devenir, quand on savait d’où ils venaient, tout ce qu’ils avaient traversé et traversaient encore. Ils étaient des survivants, ils étaient les héros de leur propre histoire, incompréhensible pour beaucoup, mais vibrante, poignante… et au moins, on ne leur reprocherait clairement pas, définitivement pas, de s’ennuyer avec eux, loin s’en faut.

Il ajouta que la Jane d’aujourd’hui était plus forte et plus sûre d’elle. C’était amusant, parce que longtemps, la jeune femme avait cru le contraire. Elle avait eu le sentiment d’être justement forte et sûre d’elle avant, et d’avoir vu vaciller toutes ses certitudes dès lors que sa relation avec Edward avait changé, évolué… Il avait pointé du doigt des incertitudes qui avaient toujours existé, et elle avait cru que cela la fragilisait. En réalité, il l’avait seulement révélée à elle-même, l’avait poussée à prendre conscience de qui elle était vraiment et de ce qu’elle pouvait être aussi, non, il ne l’avait pas fragilisée, il lui avait fait prendre conscience de failles déjà présentes, et grâce à ça, elle avait pu les corriger, et de fait, oui, elle était devenue plus forte, plus sûre d’elle. Et elle espérait bien le rester. L’être même encore davantage. Et pourquoi pas ? Avec lui, tout était permis… Le pire parfois, c’est vrai, mais le meilleur surtout, et c’était sur le meilleur – et uniquement le meilleur – qu’elle avait le désir de se focaliser en cet instant. Ça et rien d’autre, c’était tout ce qui était susceptible de la rendre heureuse, de la faire vibrer, de la faire se sentir vivante.

-Vivement demain, alors, répondit Jane avec un fin sourire quand Edward affirma que la Jane qu’elle était à ce jour, il l’aimait un peu plus à mesure que le temps passait.

Vivement demain, oui, et le jour d’après, et le suivant, parce que chaque jour qui passerait consoliderait un amour déjà puissant, un sentiment déjà fort et évident, et même s’ils avaient été bien souvent trahis dans leurs projets et leurs perspectives par ce que ce monde pouvait souvent de cruel et par leur propre cruauté également. Si demain il devait l’aimer plus que la veille, et puisque elle aussi en ferait de même, elle ne pouvait qu’adorer ce constat et le faire sien, décider de l’embrasser jusqu’au bout, sans jamais, surtout, revenir en arrière. Sous aucun prétexte, jamais. Ils s’aimaient comme des fous, et c’était tout ce qui comptait. Tant qu’ils continueraient de s’aimer. Et c’était dans leur sang.

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ane avaient les meilleures raisons du monde d’attendre le lendemain avec impatience, et pas uniquement parce que cela signifierait, selon les dires du jeune homme (auxquels son âme sœur choisissait de croire le plus volontiers du monde au passage), qu’il l’aimerait encore plus que ce n’était déjà le cas. Leur amour, dans tous les cas, était et demeurerait inquantifiable, mais d’un point de vue plus pragmatique, ils savaient aussi qu’attendre le lendemain leur serait plaisant car une pause allait partager le moment qu’ils vivaient maintenant et le suivant… pas très longue, la pause, les connaissant, mais suffisamment pour hâtiser le désir. La jeune femme n’estimait pas qu’ils en auraient besoin sur le long terme et que la bonne marche de leur relation dépendrait uniquement de ce rythme particulier, mais ici et maintenant, ça faisait un bien fou de l’adopter, et Jane ne s’en privait absolument pas. Le nombre de leurs perspectives lui mettait du baume au cœur. Parce que tout à coup, tout devenait possible, et tout était permis. Qui aurait cru, vraiment, que ce puisse être le cas il n’y a pas si longtemps de cela ? Pas elle, c’est certain, qui avait remis tant de choses en question.

Jane afficha un nouveau sourire quand Edward observa qu’il se demandait où ils en seraient dans plusieurs années, quand ils seraient « vieux » (de ce point de vue-là, ils avaient quand même pas mal de marge, ils restaient singulièrement jeunes… mais le temps pouvait passer atrocement vite ou bien très lentement, et au-delà de ça, Jane avait déjà le sentiment d’avoir vécu des centaines de vies en une seule, quand bien même elle était toute jeune encore), tous les deux. Elle s’interrogeait souvent là-dessus, elle aussi. La vie leur avait tant de fois prouvé que tout était incertain, que tout peut basculer en un claquement de doigts, que faire des plans sur la comète paraissait quelque part assez dangereux. Mais avec Edward à ses côtés, Jane trouvait tout de même le danger en question très relatif… Et pourtant sans doute plus important qu’avec n’importe qui d’autre.

Jamais, avant, elle ne s’était souciée de son avenir. Elle préférait vivre au jour le jour et ne pas se projeter plus loin. Mais avec Edward, elle avait envie de voir plus loin, de voir au-delà, même si certains horizons leur restait inaccessible, comme celui de fonder un jour une famille ensemble. Ils étaient la famille l’un de l’autre, certes, il n’empêche que c’était tout de même une perspective foulée au pied par une décision passée, et sur laquelle il était sans doute impossible de revenir.

-Moi aussi, admit-elle donc avec sincérité. Ce que je sais, c’est qu’on sera toujours ensemble. On aura peut-être failli mourir une bonne demi-douzaine de fois supplémentaires, mais on sera toujours là tous les deux. On aura retapé notre maison de fond en comble parce qu’on en aura eu marre d’elle. On bossera tous les deux, on aura peut-être même créé notre propre affaire, qui sait ? Je finirai par être plus ridée que ma mère parce que mon père aura fini par la transformer… Voilà, en gros. Elle afficha un sourire amusé. Et toi, tu vois les choses comment ?

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ane hocha la tête, affirmative, quand Edward supposa qu'ils auraient décidé de changer de maison sous prétexte qu'ils n'avaient pas assez d'espace. En réalité, ils n'en auraient jamais assez peu importe leurs décisions, de l'espace, parce qu'ils étaient doués quand il était question de s'étaler. Ils n'aimaient pas être enfermés, restreints, et cela s'appliquait à tous leurs aspects de leurs existence. Alors évidemment, s'ils pouvaient avoir plus et mieux, ils auraient plus et mieux, et c'était définitivement ce que la jeune femme désirait. Aller toujours au-delà de ce qu'il pourrait lui être possible d'obtenir, sans tolérer la moindre restriction ni quoi que ce soit de cet acabit. Elle savait que de ce point de vue, Edward et elle ne pourraient jamais être que sur la même longueur d'onde. Mais cela s'appliquait au final à à peu près tout ce qui les concernait en règle générale.

Quand Edward ajouta qu'il serait devenu un homme respecté, avec lequel tout le monde apprécierait de faire affaire, elle ne sut s'empêcher de lui adresser un tendre regard. Elle le connaissait assez pour savoir combien cela comptait pour lui, à quel point il était important à ses yeux de gagner ainsi le respect de ses pairs... Et il est vrai que si les Baker avaient une réputation correcte, ils la devaient clairement à Preston, et certainement pas à eux, qui compliquaient largement la tâche à l'aîné de la fratrie. Mais cela finirait par changer. Oui, ils avaient fait des conneries, oui, ils avaient merdé, mais tout ça serait derrière eux, et au bout du compte, ils deviendraient des références, des personnes après lesquelles on pourrait évidemment compter. Même si Jane aimait aussi l'idée qu'ils sachent parfois se faire oublier.

Pour ce qui était de Samuel, la perspective était moins réjouissante. Et dans le fond, il fallait espérer qu'il soit un ado à l'image de sa mère qu'à l'image de son père, mais bon, ça le concernait, et elle choisissait de ne pas trop y réfléchir. Ce qui la rassurait, c'était de se dire que, dans tous les cas, d'ici là, elle aurait eu le temps, largement, de s'y faire, et elle adorerait peut-être autant cet enfant - cet ado - qu'Edward lui-même.

-J'en sais rien, répondit-elle quand ils revinrent sur le sujet de ses parents. Je sais que ma mère est totalement contre. Pour le coup, elle s'en était rendu compte au moment où elle considérait que c'était peut-être le seul moyen de lui sauver la vie. Mais je sais pas ce qui est le pire, que mes parents finissent par devenir plus jeunes que moi ou que mon père finisse par perdre ma mère de vieillesse.

Dans les deux cas, la perspective était assez déroutante, et pas forcément très engageante.

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ane n'était pas habituée à parler de ses parents. Même s'ils tenaient forcément une part importante dans sa vie, en temps normal, elle occultait le sujet. Parce que c'était un sujet véritablement compliquée. Elle les aimait, plus qu'elle ne voulait bien l'admettre, mais elle n'avait pas envie de trop afficher ce sentiment encore compliqué, qui mettait en avant nombre de ses contradictions. Edward était de ceux qui en savaient le plus sur la question, auprès de qui elle se montrait le plus honnête à ce sujet. Ce n'est pas pour autant qu'elle aimait à en parler trop longuement, loin de là. Et Edward savait parfaitement comment lui parler, sans la ménager, non, mais en l'obligeant à se poser les questions qu'elle n'osait pas elle-même formuler.

Oui, la perspective que son père perde sa mère l'angoissait, mais évidemment, si elle devait se montrer honnête, elle devait bien reconnaître que oui, elle avait aussi peur de la perdre. Elle avait ressenti un peu trop profondément ce que cela pourrait lui faire, et elle savait à quel point la perte d'un parent pouvait vous faire souffrir, alors évidemment, il y avait cette angoisse-là aussi... mais elle n'était pas sûre pour autant de vouloir vieillir en voyant ses deux parents ne pas perdre une ride... et finalement mourir avant ses parents ? Quelque chose disait à Jane que Natasha ne supporterait pas de survivre à sa fille... ce n'était pas dans l'ordre des choses.

-Evidemment que j'ai pas envie de la perdre, dit-elle, ce qui n'était pas forcément, déjà, facile à admettre, quand bien même, en réalité, elle n'avait pas besoin de se montrer aussi pudique en présence d'Edward. Si quelqu'un savait tout d'elle, c'était bien lui, et elle était heureuse que ce soit le cas, il avait besoin d'en parler. Mais mourir de vieillesse, c'est la meilleure chose que je puisse lui souhaiter quand même...

Parce que ce n'était pas forcément quelque chose d'évident en notre terre. Les personnes qui mouraient de leur "belle mort" n'étaient pas bien nombreuses chez eux. Il y avait beaucoup trop... d'accidents. Il suffisait de voir combien de fois Jane et Edward avaient manqué vivre leurs derniers instants pour le comprendre. Et Natasha aussi. Quand elle avait été malade, Jane s'était sentie capable de tout pour la voir survivre, dans cette perspective, elle lui en aurait voulu éternellement de ne pas avoir accepté de se laisser mordre pour être sauvée, si elle avait dû y passer. Bref, elle était partagée. La savoir vampire, ce serait un soulagement, quelque part, et d'un autre côté, elle ne voulait pas que sa mère devienne quelqu'un d'autre... ou pire encore, qu'elle devienne elle aussi une criminelle. La seule Hardwick restante dont les mains n'étaient pas tachées de sang...

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ane haussa les épaules quand Edward affirma que l'immortalité n'était pas la pire des malédictions. La jeune femme n'en savait trop rien. Elle serait bien incapable de se montrer aussi certaine et catégorique de son côté. Le fait est qu'elle n'en savait fichtre rien, elle n'avait pas la moindre idée de ce qui pouvait valoir le mieux en fin de compte. Oui, il y avait des malédictions atroces en notre terre, elle n'avait qu'à penser à ce que subissait Gwenn pour savoir combien certaines situations pouvaient être insupportables et douloureuses. Même elle et Edward, au fond, et même s'ils s'en étaient accomodés, subissaient aussi à leur manière une forme de malédiction, contraint d'admettre leur absence totale d'individualité.

Comme pour tout, la différence résidait dans le fait de subir ou non sa malédiction. Dans le cas de Jane, elle avait seulement fait mine de la subir avant de finalement admettre qu'elle l'adorait plus que tout et ne pourrait pas s'en passer, et c'était le cas pour d'autres personnes... Ely, par exemple, semblait être la vampire la plus heureuse de son sort au monde, ex aeco avec Tristan... mais son père, lui, répétait assez qu'il était un monstre pour que Jane sache pertinemment qu'il n'était pas heureux de son sort... et sa mère ne saurait pas en être heureuse non plus, ça elle en était certaine. Oui, elle serait sans doute soulagée, un moment, de pouvoir rester auprès de l'homme qu'elle aimait, mais ça lui passerait. Et à ce moment-là, eh bien... Elle serait sans doute malheureuse, peut-être même au point d'en vouloir à Joachin de l'avoir transformée, qui sait ? En tout cas, ça ne pouvait pas être une solution, non... Et en même temps...

-Je détesterais être immortelle, observa Jane après un instant, rebondissant seulement à moitié sur les propos d'Edward, il la comprenait, elle le savait, et elle l'en remerciait. Tu voudrais ça, toi ? demanda-t-elle en tournant son regard vers son âme soeur.

Elle avait l'intuition de sa réponse, connaissant le tempérament d'Edward, elle ne serait pas surprise qu'il convoite comme tant d'autre cette sorte de perspective fascinante de jeunesse éternelle. Pourtant, Jane n'était absolument pas séduite à cette idée. Leurs caractères avaient beau être très similaires, sur ce point, ils divergeaient... Elle songeait que ce n'était pas si différent de cette volonté qu'elle avait eu de ne jamais être mère face au désir de paternité d'Edward. Il avait besoin que quelque chose, quelqu'un, lui survive, il voulait se distinguer, laisser sa marque dans l'éternité. Tout ce que Jane, de son côté, désirait, c'était être libre, se sentir libre, et c'était la seule chose qui comptait, elle ne voulait pas connaître l'angoisse de l'éternité.

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ane apprécia qu'Edward réfléchisse à la question plutôt que de lui répondre d'office par oui ou par non, comme il aurait pu le faire. En même temps, il n'avait aucune raison de prendre cela très au sérieux, c'était une simple question, qui n'avait pas de véritable implication dans leurs vies. Ce n'était pas comme s'ils pouvaient devenir immortels dans tous les cas. Mais ça restait une conversation que la jeune femme trouvait particulièrement intéressante malgré tout, parce qu'elle pouvait en dire long par ailleurs quant à d'autres aspects de leurs existences respectives. Elle sentait bien qu'il était séduit par l'idée de ne pas mourrir. Et elle pouvait le comprendre, évidemment, elle-même n'était pas particulièrement emballée à l'idée de mourrir non plus, loin de là. Quand elle pensait à la mort, qu'elle envisageait le vide que ce stade pouvait représenter, elle ressentait comme un vertige, et elle se sentait terriblement mal.

Non, elle n'avait pas envie de mourrir, mais elle n'avait pas envie non plus de vivre éternellement, elle ne trouvait pas cette pensée moins angoissante que l'autre, au passage. Car vivre éternellement, c'était voir mourir toutes les personnes qui les entouraient (à part les vampires, évidemment), c'était destituer l'existence d'une partie de sa valeur, car après tout, pourquoi savourer chaque jour de la vie si la vie était éternelle. Quand on savait comme Jane et Edward étaient de grands procrastinateurs, il était évident que cette invitation à la paresse les rendrait terriblement... mous. Plus qu'ils ne l'étaient déjà. Et ce ne serait clairement pas leur rendre service.

-Mieux vaut avoir vécu une vie courte et trépidante qu'une vie éternelle et chiante, tu ne crois pas ? dit finalement Jane. Le monde se souviendra de nous parce qu'on aura marqué les esprits le temps de notre passage, et j'aime cette idée, savourer chaque instant parce qu'on connaît la valeur de la vie, parce qu'on s'est battus pour vivre. Et puis t'imaginerais l'angoisse, de voir Samuel devenir plus vieux que toi ? Ou ses petits-enfants ? ajouta-t-elle, pas seulement pour lui délivrer un argument supplémentaire mais en se souvenant de la situation de ses parents.

Vu sous cet angle, elle comprenait que son père ne devait pas particulièrement être heureux, pas seulement parce qu'il se sentait monstrueux, mais forcément, il devait se dire qu'elle atteindrait l'âge où il avait été transformé, et elle ne lui facilitait pas la tâche, en grandissant plus vite que son âge, en quittant sa maison si vite, en se mariant si tôt... il y avait de quoi être terrifié. Bref, non, conclusion, l'immortalité, ça ne devait pas être pour eux, mais ça ne devrait être pour personne. Et dans l'idéal, personne ne devrait jamais être confronté à un tel choix, jamais.

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ane se doutait que son dernier argument aurait le don de faire mouche. Pas qu'elle ait besoin d'avoir le dernier mot, ceci dit, dans tous les cas, ils étaient mortels et n'y changeraient jamais rien quoi qu'il advienne. C'était ce qu'elle aimait à retenir dans tout cela, et ce qui la rendait véritablement heureuse. Être mortelle oui, mais être mortelle avec lui, c'était ça, qui faisait toute la différence. Et leur mort, ils allaient la vivre exactement en même temps, ce serait leur dernière grande aventure. Elle trouvait ce sentiment incroyablement exaltant, et sans être impatiente non plus d'en arriver là - il ne faut pas exgérer -, elle avait sans doute cent fois moins peur que si elle devait faire ce grand saut toute seule. Elle partirait avec lui, n'aurait pas à avoir peur de lui survivre... enfin, il fallait l'espérer, du moins. La perte d'une partie de leurs pouvoirs avait-elle alteré cet état de fait ? Elle n'en savait trop rien. Elle préférait penser pour le moment qu'ils n'auraient pas ce soucis, et que même si ce problème devait bel et bien se présenter, eh bien, ils auraient eu le temps de le résoudre avant tout.

-Mourir avec toi, c'est la meilleure façon de mourir, dit-elle doucement en se serrant contre le jeune homme.

Elle déposa ses lèvres sur les siennes. On pourrait affirmer qu'évoquer leurs morts respectives n'était pas la meilleure manière d'agir, mais la jeune femme s'en moquait, car quand elle parlait de cela, elle le faisait sans angoisse particulière ni intention de plomber l'amosphère, elle le faisait avec amour et une profonde confiance, sans cesse renouvelée, et qu'elle ne saurait sentir plus puissamment qu'en cet instant très précis. Elle était plus certaine que jamais de ce qu'elle ressentait, et ça faisait du bien.

-Et vivre éternellement avec toi serait un véritable enfer. Tu imagines ? On devrait se séparer et se remettre ensemble plusieurs bonnes centaines de fois pour maintenir un équilibre.

Bien sûr, elle plaisantait... Enfin, disons qu'elle n'était pas totalement sincère, n'empêche qu'elle préférait ne pas trop imaginer ce que serait leurs vies si, vraiment, elle devait durer pour toujours. Ils s'ennuieraient comme n'importe qui, c'est certain. Mais justement, ils ne supporteraient sans doute pas cet ennui, et pour y pallier, il était très probable qu'ils choisissent quelques méthodes de leur cru. Et généralement, ça résidait en engueulades de toutes sortes, et en réconciliations sur l'oreiller, avec plus ou moins de temps entre les deux et plus ou moins de violence et de fougue pendant les deux. Elle trouvait ça épuisant sur la durée d'une vie, mais peut-être que sur toute une éternité, ce serait la seule façon qu'ils trouveraient de conserver la flamme... ce qui, très objectivement, ne faisait pas forcément rêver, en fin de compte, loin de là.

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ui, on pouvait effectivement voir les choses de cette manière : c'était un effort constant pour eux d'être en couple. Certes, ils s'amélioraient avec le temps, mais c'était tout de même loin d'être acquis encore, et la jeune femme songeait que n'avoir que le temps d'une vie pour mener à bien leur histoire, c'était parfait, de toute manière, elle avait déjà le sentiment qu'ils avaient vécu plusieurs vies en une seule... Alors oui, vivre leur histoire, c'était l'équivalent de courir un marathon constant, et il n'était pas improbable qu'ils finissent par mourir d'épuisement à un moment ou à un autre, parce que leur relation aurait eu raison de leur santé physique ou encore mentale. Mais c'était aussi ce qui rendait leurs vies si exaltantes. Et aussi, ce n'est pas comme s'ils n'apprenaient pas de leurs erreurs, bien au contraire... C'était simplement qu'ils étaient prompts à en faire beaucoup, des erreurs, et il leur fallait mettre beaucoup d'orgueil de côté pour parvenir à les éparer.

Elle afficha un sourire en coin quand il ajouta que c'était épuisant de se réconcilier. Elle savait qu'il ne le disait qu'en référence à une seule et unique chose, à savoir leurs réconciliation sur l'oreiller, mais c'était aussi négliger à quel point il était épuisant mentalement de vivre tout cela... Enfin, ils n'étaient pas là pour en parler, loin de là. Ils se connaissaient assez pour savoir ce qu'il en était, il n'y avait aucun réel besoin d'en rajouter au bout du compte. Alors oui, autant se contenter de faire référence "subtilement" à leurs ébats divers et variés. C'était clairement le point sur lequel il n'y avait jamais de désaccord. Parce que quand leurs corps s'unissaient, eh bien, c'était juste... la perfection, et il n'y avait plus rien à redire ou à reconsidérer, jamais.

-Petite nature, je ne savais pas que c'était un tel fardeau pour toi, répondit-elle avec légèreté à son tour.

Pour ce qui était de se chambrer mutuellement, ils savaient clairement y faire, tous les deux, ça ne faisait pas le moindre doute. Alors elle ne doutait pas du fait qu'il rentrerait dans son jeu comme elle ne se priverait pas non plus de rentrer dans le sien.

-Je vais te ménager, dans ce cas, mieux vaut éviter de trop t'épuiser.

Traduction : ceinture ? Comme s'ils en étaient capables l'un et l'autre. Qu'ils se détestent à en crever ou qu'ils s'aiment à la folie, ça n'y changeait rien, ils s'attiraient avec une telle force, un tel désir à constamment assouvir qu'ils seraient tout simplement incapables de se passer du corps de l'autre. Et aucune raison ne suffirait jamais à les dissuader de le faire au passage.

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